Pourquoi j'écris des bêtises ? Des trucs dont tout le monde se fiche...
D'habitude j'raconte ma vie et là, tout d'un coup je suis complexée.

Finalement p't'être que je suis bête, qu'en fait tout le monde n'a qu'une envie c'est que je m'en aille.
Je suis "gentille" mais de loin.

Cette satanée Liliane obtient sûrement l'effet qu'elle désirait. Me mettre la tête sous l'eau. Encore une fois.

Comme si l'image que j'ai de moi n'était pas assez pitoyable comme ça.

Oh je sais qu'il faut que je me blase, que je réussisse à m'élever au dessus des critiques, au dessus des blagues qui ne me font pas rire et qui m'feraient plutôt pleurer.
Je sais qu'il faut que je cesse de penser à tous ces eux, qu'ils ne me demandent rien, que c'est moi qui me fait des films pour tout.
"C'est que j'ai... Comme qui dirait... Un problème... De relation... C'est mental, c'est viscéral, y'a pas de solutions..." je suis... psycho-parano !!!

Quand j'étais petite j'ai un jour cauchemardé que j'arrivais à l'école, toute nue, et que tout le monde se moquait de moi, tout le monde me montrait du doigt.
Il paraît qu'on fait tous des rêves un peu comme ça quand on est petit.
N'empêche que je me suis réveillée les joues toutes rouges.
Je n'ai pas tellement honte de mon corps, même si je ne le trouve pas spécialement beau.
Je n'ai pas tellement honte de moi non plus.

Mais on m'arrête dans la rue pour me dire que je suis moche.
Quand je suis avec des copines dans la rue, elles se font toutes draguer,
pas moi.

"Hé ma jolie..."
"Oui ?"
"Mais non pas toi, la fille qu'est derrière..."

En même temps je m'en fous, "j'ai ce qu'il faut à là maison", mais on se sent toujours un peu gênée dans ces cas là. On veut faire celle qui s'en fiche, qui attend, et puis il y a un truc sur notre visage, un truc qui bouge, qui nous trahit.

C'est le regard, le regard violent des autres qui tout d'un coup me rétrécit, me rend faible et minuscule. Et même si Voltaire dit qu'on est tous faibles et minuscules, et ben y'en a pas beaucoup qui s'en rendent compte.

Parce qu'au fond, ils ont tous trouvé l'arme pour se défendre. Que ce soit l'humour, la méchanceté, le silence, la beauté. Moi j'ai l'impression d'avoir été livrée sans arme. J'ai l'impression d'être brut. Et pas brute, hein. Brut. Comme le cidre.

L'impression que tous les autres ont été lissés, ont été soigneusement conçus, qu'on leur a donné de quoi se cacher, de quoi se défendre, toujours.
Alors que moi j'ai l'impression d'avoir été taillée, hop, et puis voilà.
D'être le vilain petit canard.
De ne pas voir la vie comme les autres la voient.
De ne pas voir le monde comme les autres le voient.

J'devrais p't'être me lancer dans une carrière de peintre. Je montrerais aux autres mon regard sur le monde.

Si on m'appelle "artiste" ou "douée", c'est parce que depuis que je suis petite, j'essaye de trouver le moyen d'expression qui me convient.
Mais en face de la terre, je ne sais quoi modeler ? En face de la toile, je ne sais quoi peindre ? En face de la feuille... Je ne sais quoi écrire ?
Non en fait, je trouve toujours quelque chose à modeler, à dessiner, à peindre, à chanter, à écrire...

Il faudrait que j'apprenne à le dire.
Mais je ne sais pas parler.
Depuis que j'ai un cerveau, j'ai toujours pensé que la parole était le don le plus fabuleux que l'Homme possédait. Et puis après, plus j'ai poussé, plus je me suis rendu compte que finalement ce don n'était pas si bien exploité.
Pourquoi gaspiller de la salive à traiter tout ce qui bouge par tous les injures existantes (ou pas) ?
Je n'ai jamais tellement aimé les grossièretés. Ni le fait qu'on tape sur les gens. Oh même si parfois on est emporté par une pulsion...
Pourquoi donner une raclée à un enfant ? Alors qu'on l'a tant désiré...
Ah oui, "il faut les dresser".

Moi je ne propose pas de solutions, je sais, et tout ce que je dis ne tient pas debout puisqu'il n'y a aucun pilier.